Une formation doit aider les gens à grandir

« Une formation doit aider les gens à grandir » C’est Lionel Brabant, spécialiste en formation, qui s’exprime ainsi dans le numéro 61 de la Revue Française de Yoga, parution de janvier 2020, dans un entretien croisé avec Alain Leu, lui aussi expert en formation.

Tous deux sont les auteurs d’un livre particulièrement éclairant sur ce sujet : Pédagogie expérientielle et croissance personnelle dans les groupes de formation (Meyzieu, Alèthéia éditions, 2016).

Ouvrage que les enseignants et les formateurs de yoga devraient lire sans hésiter tant il résonne avec les enjeux propres à leur transmission en offrant des clés essentielles pour comprendre la place et le rôle de chacun dans tout processus de formation.

 

Dans ce dialogue vivifiant, Alain Leu et Lionel Brabant précisent d’emblée qu’une formation ne se limite pas à la validation d’un certain nombre d’acquis mais comporte, si elle est pertinente et porteuse de sens, une dimension plus essentielle qui aide les personnes recevant cette formation à grandir dans leur humanité, que les personnes se forment à la boulangerie, au management ou au yoga. Dans l’extrait issu de cet entretien, les deux auteurs expliquent plus avant cette notion de croissance et pourquoi ils la préfèrent à celle de développement personnel.

À gauche Alain Leu, à ses côtés Lionel Brabant

Il s’agit d’élargir son champ de conscience

Lionel Brabant : L’expression de développement personnel est très galvaudée et veut à la fois tout dire et rien dire. Nous avons donc cherché une alternative. Selon moi, une formation doit aider les gens à grandir, d’où cette idée de croissance. Il n’y a aucun paternalisme là‐dedans : il s’agit d’aider les personnes à devenir plus autonomes. En ce sens, le terme de croissance me semble plus juste que celui de développement personnel. Il s’agit d’élargir son champ de conscience, ce qui signifie qu’à l’issue de la formation, on sait plus de choses sur soi.

Pourquoi a‐t‐on besoin de cette dimension quand on apprend la boulangerie ? Tout d’abord, rien ne nous oblige, en effet, à nous occuper de croissance pour apprendre la boulangerie. Mais les personnes qui apprennent la boulangerie vivront bel et bien, elles, des situations d’élargissement de leur champ de conscience. Qu’elles soient prises en compte, ou pas, par le formateur. S’il ne les prend pas en compte, les stagiaires vivront ces situations seuls, sans être aidés et ils continueront d’apprendre la boulangerie de manière classique. En revanche, si le formateur s’occupe de cette dimension de croissance, il fait deux choses. D’une part, il permet aux stagiaires d’intégrer plus rapidement ce qu’ils sont en train d’apprendre parce qu’ils font le lien entre ce qu’ils apprennent et eux‐mêmes. D’autre part, il ajoute à son travail de formateur le fait qu’il aide les gens à grandir. Il leur offre la possibilité de réfléchir à eux‐mêmes en même temps qu’ils réfléchissent à la boulangerie. Cela se fait en même temps et ne coûte pas plus cher !

L’idée de croissance est inhérente à l’être humain

Alain Leu : Tout petit, ce dernier a un potentiel remarquable. Ensuite, c’est le milieu dans lequel il pousse qui lui permet, ou pas, de se développer. Et lui, l’humain, a envie de se développer. Si on lui fournit des occasions, le moteur se met en route. C’est vrai tout le temps, toute la vie. L’être humain a d’emblée un capital génétique, puis, en vertu des lois de l’épigénétique, son potentiel va pouvoir se développer en fonction du contexte, des circonstances, de la nourriture réelle et affective reçue.

On retrouve cela dans un groupe où se crée la croissance, où les personnes sont en croissance simultanément, ce qui crée du lien entre elles. C’est aussi, de notre part, une forme d’engagement éthique qui s’inscrit dans le courant de la psychologie humaniste existentielle. Nous faisons confiance, comme Carl Rogers avant nous, dans le potentiel de chaque être humain. Personnellement, chaque fois que l’on peut créer ou trouver des lieux favorables au développement de l’humain, je suis preneur ! L’être humain dispose d’un degré de liberté et de responsabilité face à ce qui lui arrive. C’est aussi cela qui est transmis dans les groupes de formation.

Faire vivre cette dimension de croissance n’est d’ailleurs pas si difficile

Lionel Brabant : Il suffit de demander aux stagiaires ce qu’ils en pensent. À partir du moment où l’on donne la parole aux personnes, elles parlent d’elles et, ce faisant, elles vont se mettre en croissance.

Dans la mesure où l’animateur a la compétence pour écouter et gérer ces moments, ils se présentent spontanément. Je ne dis pas que c’est facile à faire. Mais si on donne cette opportunité aux stagiaires, ils la saisissent tout de suite parce que c’est un vrai besoin. Je mettrais néanmoins un bémol : ils sont contents de le faire, sous réserve qu’ils fassent le lien entre ces moments de croissance et l’objectif général de la formation.

 

Mémoire, attention, compréhension :
c’est le titre de la RFY n°61 qui explore ces trois notions car elles sont au cœur de la relation pédagogique.

Ce numéro est la restitution du séminaire des formateurs de yoga qui s’est déroulé les 9, 10 et 11 novembre 2018 à l’EFY Paris.

 

 

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Bonne lecture !

 

Directrice de rédaction de la Revue Française de Yoga  : Anne Ulpat 

Directrice de la publication de la RFY : Marie-Christine Leccia 

La RFY éditée par la Fédération Nationale des Enseignants de Yoga (FNEY)

 

Photos : Régis Vereecke ©

1 Commentaire
  • Anne Ulpat

    25 mars 2020at9 h 54 min Répondre

    Thank you so much !

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